Élections européennes : la progression de l’extrême droite menace l’Union d’implosion

« C'est un moment dangereux d'instabilité politique pour l'UE - et un moment de vérité. Le glissement vers la droite indique des dangers plus profonds et ne devrait pas conduire à de simples conclusions politiques, car l'Europe vacille et les ennemis de la liberté et de la démocratie n'attendent que cela », prévient Henning Vöpel, directeur général du CEP. Selon Salman Rushdie, le monde est en train de vivre un « moment de colère ».
 
S’agissant du cas français – le plus grave avec le RN à 31,5% -, « il conduit Macron à revisiter la dissolution de De Gaulle en 1968, qui faisait suite à ce que le premier président de la Vème République avait alors analysé comme un désaveu cinglant de sa politique, accompagné d’un risque de désordre notable dans le pays », souligne Victor Warhem à Paris. « Les législatives à venir vont dans le meilleur des cas redonner du souffle à Macron et son gouvernement, ou achever de l’enterrer politiquement. Quoi qu’il arrive, les résultats du 7 juillet prochain vont avoir de grandes répercussions sur les politiques menées en Europe ces prochaines années », conclut-il.
 
M. Vöpel, ainsi que les experts du cep, Victor Warhem, et Andrea De Petris à Rome, tirent au final trois conclusions du résultat des élections :

• L'UE est menacée d'éclatement, car les élections ont non seulement un impact direct sur la composition du Parlement européen, mais aussi un effet indirect mais très fort sur la politique nationale des États membres. Dans de nombreux États membres, le résultat des élections aura pour conséquence une orientation politique intérieure encore plus forte et un repli sur la défense des intérêts économiques nationaux. La renationalisation de la politique observée dans le monde entier depuis un certain temps menace également l'Europe. Pour l'UE, un retour aux États-nations signifierait en fin de compte la mort de l'Europe.
• La prochaine Commission doit à nouveau renforcer l'UE dans ses fondements et formuler un programme pour la souveraineté et la compétitivité, faute de quoi l'UE risque d'être écrasée dans l'âpre conflit géopolitique entre les États-Unis et la Chine en cet instant de faiblesse interne. Mario Draghi présentera un rapport à ce sujet qui aura probablement un caractère programmatique pour l'agenda de la prochaine Commission.
• La politique elle-même doit changer. Ces dernières années, elle est devenue de plus en plus dirigiste, bureaucratique, autoritaire et irréaliste. Ce ne sont pas les objectifs eux-mêmes, mais la voie suivie qui est de plus en plus perçue comme une aberration. Les préoccupations croissantes en matière d'emploi et de sécurité se heurtent à une perte de confiance de plus en plus grande dans la politique. Les tentatives des partis politiques d'expliquer qu'ils n'ont pas été en mesure de mettre en avant leurs propres politiques de manière suffisamment claire sont dangereusement inconscientes d'un point de vue analytique. Les inquiétudes sont profondes et justifiées.